samedi 5 juin 2010

Bruxelles-Hal-Vilvorde ou Athènes ?

A première vue, BHV résume l’enjeu du 13 juin : les prochaines élections législatives fédérales seraient destinées à clarifier le rapport de forces entre les partis flamands et à inaugurer, sur cette base, un nouveau round de négociations institutionnelles.

Cette définition des termes de la crise actuelle n’est pas fausse, mais elle est trop limitée. Certes, la décision d’Alexandre De Croo de provoquer la fin du gouvernement Leterme II s’explique par un pari, très risqué, sur les chances de l’Open-Vld d’évincer le CD&V dans son statut de parti traditionnel capable de capter une part importante du vote régionaliste flamand. Certes, l’avenir de la Région de Bruxelles-Capitale et la redéfinition des droits des francophones de la périphérie de la capitale sont à l’agenda. Cependant, la Belgique ne souffre pas seulement des soubresauts d’une crise communautaire interne qui a commencé au début du siècle passé alors qu’un capitalisme francophone, mais pas essentiellement wallon, bafouait les droits culturels et la langue de la population néerlandophone. La crise qui menace notre pays comporte en effet une dimension internationale nettement plus grave dont l’étranglement socioéconomique de la Grèce et les émeutes d’Athènes démontrent la gravité. En effet, la Belgique n’est pas seulement caractérisée par un déficit d’unité politique, elle connaît, comme la Grèce et d’autres pays européens, un important déficit budgétaire.

Est-ce grave un déficit budgétaire ? « Oui », hurlent les économistes néolibéraux qui réclament simultanément une diminution des prestations sociales, du nombre de fonctionnaires et de la fiscalité. « Ca dépend », répondent ceux qui veulent bien se souvenir que les sciences économiques ne se résument pas aux options de Reagan, Thatcher et de leurs héritiers Bush, Cameron et Merkel. Pour les particuliers, l’endettement est un incontestable fardeau qui résulte essentiellement aujourd’hui des prix de l’immobilier, de l’énergie et de l’incitation à la surconsommation typique de la société de masse. Pour les communes, c’est un risque lourd pour leur autonomie. Pour les collectivités publiques de la taille d’une Région ou d’un Etat, c’est à la fois l’indicateur de difficultés et un outil, ou, en d’autres termes, la maladie et le remède. La dette publique résulte en effet d’un décalage entre le montant des recettes -que le pouvoir politique peut faire varier plus facilement qu’un travailleur son salaire- et celui de dépenses dont les citoyens sont normalement les destinataires finaux. En d’autres termes, bien administrée, la dette publique d’une collectivité de la taille d’une Région ou d’un Etat -je ne parle donc pas d’une commune comme Ecaussines- est l’instrument d’une politique d’investissement dans l’avenir. Elle ne devient inquiétante que lorsqu’elle dépasse le montant de la richesse nationale ou que lorsqu’elle sert essentiellement à payer les intérêts d’un capital que les pouvoirs publiques ne parviennent plus à rembourser.

Le déficit budgétaire belge est-il grave à l’aune de ces critères ? La réponse devrait être négative car les finances publiques ont été redressées de façon remarquable avant que n’éclate la crise boursière mondiale. Alors qu’elle atteint encore 130% du PIB dans les années 1990, elle passe en-dessous de la barre symbolique des 100% au début des années 2000, à la satisfaction des partenaires de l’Union Européenne. Entamé par les gouvernements Dehaene, l’assainissement des finances publiques ne donne pas lieu à un bain de sang social grâce à la présence des socialistes au gouvernement fédéral.

En outre, la dégradation récente des comptes nationaux est quasi exclusivement imputable au coût du sauvetage des épargnants avec l’argent desquels les multinationales bancaires avaient joué. Bref, objectivement, la soi-disant crise des finances publiques n’est pas le résultat d’un déficit de gouvernance en Flandre, en Wallonie ou à Bruxelles, mais des errements du capitalisme financier des rentiers.

Et pourtant… la Grèce vient de nous offrir l’exemple de ce qu’il peut advenir d’un petit Etat endetté et que sa faiblesse livre en pâture aux marchés internationaux. Qu’une partie de la faiblesse politique de la Grèce face au marché provienne de manipulations comptables dont ses gouvernements se sont rendus coupables importe peu. Fondamentalement, la crise grecque tire son origine à la fois d’un déficit budgétaire creusé par ses gouvernements de droite et d’un déficit de crédibilité internationale. La Belgique pourrait bientôt partager cette double caractéristique si elle ne devait plus être gouvernable le 14 juin au matin. A la lecture des interventions dans la presse des responsables politiques et économiques flamands, il paraît douteux que l’intention des nationalistes flamands soit de provoquer l’éclatement pur et simple du pays. Par contre, la taille des enjeux mis sur la table -qu’il s’agisse de la réforme de BHV ou de la Sécurité sociale- prouve que la négociation en vue de la formation d’un gouvernement sera ardue. Fondamentalement, l’enjeu de cette négociation est l’avenir de la répartition entre la Flandre et la Wallonie des ressources nationales : ni plus, ni moins.

Cette négociation sera difficile mais elle doit être rapide. Dans un tel contexte, seul un front francophone piloté par un parti de gauche responsable permettra d’aboutir.

La constitution d’un tel front n’est pas encore garantie: certains acteurs francophones, notamment à Bruxelles, restent tentés par la démagogie populiste et certains ennemis du PS croient encore à l’efficacité électorale de la calomnie. Or, la Belgique ne peut se payer le luxe d’une nouvelle interminable négociation gouvernementale comme aux dernières élections législatives. Si ce scénario se répète, le ridicule nous tuera cette fois car les spéculateurs, déjà occupés à jouer avec l’euro, profiteront du vide du pouvoir et s’amuseront à nos frais avec les titres de la dette belge.

Le 13 juin, nous devons voter pour un parti qui, après avoir relancé l’économie wallonne, peut réformer et sauver la Belgique. Ce parti, c’est le PS !

1 commentaire:

  1. Face au chantage de l'empire financier :

    Crise des « subprimes », crise bancaire, accélération de la destruction de l'agriculture, de l’industrie et des emplois. Puis aujourd’hui crise de l’euro, crise de la dette publique des États, destruction du service public, chantage sur les retraites. Sans oublier les divers plans injustes pour sauver les banques !

    Nous devons nous organiser et nous mobiliser massivement pour demander à faire la lumière sur la crise financière en convoquant immédiatement une commission d'enquête parlementaire !

    Rejoins moi sur mon groupe facebook : http://fr-fr.facebook.com/group.php?gid=104166076293247&ref=ts

    David CABAS
    david.cabas.over-blog.fr

    RépondreSupprimer